Violences conjugales : que faire ?
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Quitter le domicile conjugal : n’oubliez pas de déposer plainte
Si vous êtes victime de violences, vous pouvez quitter le domicile conjugal mais vous devez préalablement déposer plainte au commissariat ou à la gendarmerie. L’objectif est de faire constater les faits par les forces de l’ordre. La plainte servira de preuve si votre conjoint réclame ensuite le divorce pour faute. Une fois la plainte déposée, vous pouvez quitter le domicile conjugal.
Ayez le réflexe certificat médical
En cas de violences physiques ayant entraîné des coups et blessures, pensez à consulter votre médecin. Ce professionnel de la santé vous fournira un certificat médical attestant des coups reçus, qui pourra également servir de preuve en cas de procédure judiciaire.
Pensez à saisir le juge aux affaires familiales
Vous pouvez aussi saisir le juge aux affaires familiales via une procédure d’urgence, avec l’aide d’un avocat. Si vous avez quitté le domicile conjugal sans vos enfants, vous devez saisir le juge aux affaires familiales en urgence afin qu’il statue sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Vous pouvez demander au juge le divorce pour faute car les violences conjugales constituent une violation grave des obligations du mariage.
Vous pouvez demander le bénéfice de l’aide juridictionnelle si vos ressources ne dépassent pas un certain plafond.
L’ordonnance de protection pour mettre en place des mesures d’urgence
L’ordonnance de protection est un dispositif qui met en place des mesures d’urgence en cas de violences conjugales. Il n’est pas nécessaire que vous ayez déposé une plainte au préalable ou que votre agresseur ait été condamné sur un plan pénal. C’est une procédure rapide qui s’applique indépendamment d’une procédure de divorce ou d’une procédure pénale. Vous pouvez saisir le juge aux affaires familiales directement, avec l’assistance d’un avocat. Le Procureur de la République peut également saisir le juge avec votre accord.
Après réception de votre demande d’ordonnance de protection, le juge va vous convoquer ainsi que votre agresseur. Vous serez tous les deux accompagnés de vos avocats respectifs et auditionnés. Vous pouvez demander à effectuer ces auditions dans des lieux séparés.
Le juge statue ensuite dans un délai maximal de 6 jours après la fixation de la date de l’audience et peut interdire à votre agresseur :
• de recevoir, rencontrer ou d’entrer en contact de quelque manière que ce soit avec les personnes désignées dans l’ordonnance de protection,
• de se rendre dans certains lieux comme votre lieu de travail ou votre domicile,
• de détenir ou de porter une arme.
Le juge peut également proposer à votre agresseur une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ainsi qu’un stage de responsabilité pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et les violences sexistes. En cas de refus, le juge en avisera directement le Procureur de la République qui décidera de l’opportunité, ou non d’engager une action pénale.
Si vous en faites la demande, le juge se prononcera sur l’attribution du logement familial qui pourra vous revenir même si vous n’en êtes pas propriétaire. Si vous avez préalablement bénéficié d’un logement d’urgence, les frais pourront être mis à la charge de votre conjoint violent. Si vous changez de domicile, le juge peut dissimuler votre adresse à votre agresseur.
Le juge va également se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et les modalités du droit de visite et d’hébergement. Si vous êtes mariés ou pacsés, le juge se prononcera sur la contribution aux charges du mariage et l’aide matérielle. Il définit également les modalités de la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants.
Sachez que si votre agresseur a été condamné pénalement, son droit de visite et d’hébergement lui sera automatiquement retiré. Dans le cas contraire, l’ordonnance de protection peut prévoir que l’exercice de ses droits s’effectuera dans un espace neutre en présence d’un tiers de confiance.
Le dépôt de plainte
Si vous souhaitez faire condamner votre agresseur, à de la prison notamment, vous devez lancer des poursuites pénales à son encontre. Pour cela, vous devez déposer plainte pour violences conjugales à la gendarmerie ou au commissariat. Vous pouvez déposer plainte dans n’importe quel commissariat ou gendarmerie. Sachez que les officiers de police ou de gendarmerie ont l’obligation de recevoir votre plainte quel que soit le lieu de commission de l’infraction, votre lieu de résidence et peu importe qu’il existe ou non, au moment du dépôt de la plainte, des éléments prouvant l’infraction.
Le dépôt de plainte entraîne la saisine du Procureur de la République qui décidera d’engager, ou non, des poursuites pénales à l’encontre de l’auteur des violences. Pensez à réunir un maximum de preuves : main courante, certificat médical, photographies, enregistrements audio et vidéo, témoignages, etc. Vous pouvez déposer plainte à tout moment, il n’est jamais trop tard ! Le délai de prescription est de 3 ans pour les coups et blessures et 10 ans pour les viols aggravés.
Lorsque vous déposez plainte, l’officier ou l’agent de police judiciaire qui reçoit votre plainte doit vous informer de votre possibilité de demander à bénéficier du bracelet anti-rapprochement.
Le bracelet électronique pour éviter que votre conjoint violent ne s’approche encore de vous
Avec vos consentements respectifs, le juge peut ordonner le port d’un bracelet anti-rapprochement à votre agresseur. Ce bracelet électronique le géolocalise en permanence et vous avertit, au moyen d’un boîtier que vous détenez, s’il franchit le périmètre fixé par l’ordonnance. Si votre agresseur refuse ce dispositif, le juge en informera immédiatement le Procureur de la République qui pourra décider d’engager une action pénale.
Sachez que seules les personnes déjà condamnées peuvent utiliser le bracelet ainsi que celles poursuivies pour violences. La condamnation doit être au minimum de 3 ans d’emprisonnement.
Le juge a également la faculté de se prononcer sur votre admission à l’aide juridictionnelle. Il s’agit d’une aide d’Etat pour les personnes aux revenus modestes vous permettant de payer tout ou partie de vos frais de justice.
L’avantage du bracelet anti-rapprochement est qu’il apporte la preuve judiciaire et donc incontestable que la personne violente n’a pas respecté ses obligations.
Le téléphone grave danger : un dispositif d’alerte complémentaire
Le téléphone grave danger (TGD) permet à une femme victime de violences conjugales d’alerter lorsqu’elle voit son agresseur potentiel près d’elle. Ce dispositif laisse une plus grande liberté d’action aux femmes victimes de violences puisque c’est à vous de décider si vous appelez à l’aide ou non. La responsabilité de l’alerte repose sur la victime.
Techniquement, il s’agit d’un téléphone portable disposant d’une touche dédiée permettant de joindre un service de téléassistance 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. La plateforme téléphonique qui reçoit votre appel va ensuite évaluer la situation. Si vous êtes en présence d’un danger grave, l’appel est relayé à la gendarmerie nationale qui peut demander l’intervention des forces de l’ordre. Le dispositif permet de vous géolocaliser immédiatement, si vous y consentez.
Vous serez assistée et suivie dans toutes vos démarches par une association. Pour bénéficier de ce dispositif, vous ne devez plus habiter avec l’auteur des violences et l’interdiction pour lui d’entrer en contact avec vous doit avoir été formalisée sur le plan judiciaire.
Le téléphone grave danger est délivré sur décision du Procureur de la République après évaluation de votre situation faite par une association, pour une durée de 6 mois renouvelable.
Quelle que soit votre situation, n’hésitez pas à faire appel à un avocat du réseau GESICA qui saura vous guider et vous assister au mieux dans vos démarches
L'auteur
Florence SIX
Avocat